Memory
Revivre des moments passés, ressentir d’« anciennes » émotions, nous donnent la certitude d’un vécu. Le temps passe et transforme tout en un songe qu’un jour nous emporterons.
Aujourd’hui, ce rêve nous pouvons l’enfermer dans une série de CD et revivre la vie de quelqu’un d’autre dès que nous le souhaitons. Aujourd’hui notre vécu peut contenir des scènes inventées ou altérées, un vécu imaginaire qui, à travers la fausse information, la manipulation et l’incessant lavage de cerveau va s’accrocher dans la partie la plus profonde de notre mémoire et un jour émerger pour nous faire vivre une réalité virtuelle. Nous sommes constamment submergés d’images manipulées que l’on finit par croire « vraies ». Nous accumulons une quantité énorme d’informations inutiles ou erronées qui nous désoriente au point de ne plus savoir qui nous sommes et ce que nous voulons et encore moins ce qu’ils veulent. Les émotions, les sentiments essentiels sont réduits à moins que rien. Le bien et le mal, nous ne le vivons qu’à travers le corps. Un corps que nous voudrions voir changer toutes les fois que le système nous impose un nouveau modèle. Un système qui nous menace et nous chantage constamment. « Se sentir exclu lorsque nous ne sommes pas capables, ou n’avons les moyens de suivre les schémas d’un système exigeant et dictatorial ». L’équilibre entre l’eros, l’agape et la psyche s’est complètement inverti, la psyche existe seulement pour une agape égoïste et un eros sado narcissiste, en un mot nous sommes en train de perdre notre identité personnelle, subjective et collective.
Ai-je été un enfant ? J’en doute lorsque je me regarde dans un miroir. Ce que je vois est tout autre chose et pourtant je suis convaincu de l’avoir été. En regardant de vieilles photos j’entends mon cerveau se mettre en route. J’ai l’impression d’être au cinéma, la lumière s’éteint et tout à coup une série d’images commence à dérouler sur un écran impalpable. A chaque scène, mon état d’âme change ; parfois triste, parfois nostalgique, heureux, mélancolique, j’ai peur. J’ai envie de pleurer, pas pour ce que je vois ou pour les émotions que je ressens mais parce que ça, c’est mon passé, parce que cet enfant si lointain, est en même temps si proche. Grâce à la mémoire il peut briser la barrière du temps et marcher de mon côté pour m’accompagner au bout du voyage et, ensembles, fermer à jamais la dernière porte de ce bref couloir qu’est la vie.
Rino TELARO